Le phénomène messianique dans son ensemble s’articule sur le phénomène de l’attente, à tel point que l’exaspération de l’attente apparaît comme la dimension essentielle de la conscience messianique. C’est à dire que le propre du messie est d’arriver, en permanence. Et l’attente messianique est l’expression ardente d’une communauté tournée tout entière vers l’avenir que lui réserve son dieu, à une époque et dans un lieu précis.
Cette réalité, nous l’avons en tant que chrétiens largement réduite à sa dimension liturgique au moment du temps de l’Avent.
Il faut avouer que le vivre autrement nous est compliqué, car nous sommes très influencés par une conception du temps issue de la modernité des Lumières qui voit l’Histoire comme un long aboutissement vers le progrès. Comme une chronologie imperturbable qui égrène les mois et les années, et dans laquelle le Messie serait alors un aboutissement.
La grâce de la présence de Dieu, cependant, n’est pas un aboutissement : elle est irruption.
Franz Rosenzweig a écrit une phrase qui pourrait qualifier le temps messianique auquel nous sommes invités à prendre part, en tant que croyants, dans notre rencontre avec le Christ : « Il y a un aujourd’hui qui n’est qu’un pont vers demain, et il y a un autre aujourd’hui qui est un tremplin vers l’éternité ».
C’est à ce temps que nous sommes invités à la lecture de l’Évangile, comme le sont les personnes que le Christ rencontre les unes après les autres dans leur diversité. Ainsi, le temps de la rencontre messianique n’est pas un autre temps, qui aurait son lieu dans un ailleurs improbable, ni d’un temps à venir.
Le temps du Messie n’est pas identifié au temps du futur. C’est le propre de la prédication du Christ, le Messie, que de rendre attentif à ce temps qui s’ouvre désormais pour quiconque en perçoit la richesse.
La littérature, dans l’urgence d’un XXème siècle tourmenté, a su mettre des mots sur cette réalité bien mieux parfois que n’a su le faire la théologie.
Dans ses Lettres à un jeune poète, Rilke écrit dans la Sixième lettre, en 1903 :
« Si vous éprouvez angoisses et tourments en évoquant votre enfance dans tout ce qu’elle a de simple et de secret, parce que vous ne pouvez plus croire en Dieu qui s’y trouve à chaque pas, alors demandez-vous, si vous avez vraiment perdu Dieu. N’est-ce pas plutôt que vous ne l’avez jamais possédé ?
Et pourquoi le chercher comme si vous l’aviez perdu ? Pourquoi ne pas penser qu’il est celui qui viendra, qui de toute éternité doit venir, qu’il est le futur, le fruit accompli d’un arbre dont nous sommes les feuilles ? Quoi donc vous empêche de projeter sa venue dans le devenir et de vivre votre vie comme un des jours douloureux et beaux d’une sublime grossesse ? Ne voyez-vous donc pas que tout ce qui arrive est toujours un commencement ?
Quel sens aurait notre poursuite si celui que nous cherchons appartenait déjà au passé ? Et en effet, Quel sens aurait notre recherche de Dieu si celui que nous cherchons appartenait déjà au passé ? »
Ainsi, au-delà de l’attente qui caractérise historiquement le temps du Messie, que cette irruption qui ne cesse de poindre à l’horizon résonne pour chacune et chacun comme une promesse inépuisable.
Le Messie pour Rilke est celui qui sans cesse, vient, et qui n’en finit pas de venir : il incarne à lui seul le moment favorable, qui plutôt que d’arriver, surgit.
Heureux ceux qui prennent conscience de cette réalité, pour reprendre une formule de béatitudes. Heureux dans l’éternité de l’aujourd’hui.
Pasteur Fabian Clavairoly
A noter :
- Samedi 14 décembre à 16h30 : Culte des tout-petits
- Dimanche 15 : PAS DE CULTE LE MATIN AU BOUCLIER
- Dimanche à 15 à 17h00 : Veillée de l’Avent Magnificat de Carl Philipp Emanuel Bach interprété par le chœur du Bouclier
- Mardi 17 décembre à 20h00 : Concert du chœur Méditerranée au Bouclier
- 22 et 23 décembre de 13h30 à 14h30: Répétitions des enfants de Dimanche en Fête pour la Veillée de Noël
Mardi 24 décembre à 18h00 : Veillée de Noël
Mercredi 25 décembre à 10h30 : Culte de Noël